C'est en 1993 que Sa Sainteté le XIVème Dalaï-lama, Tenzin Gjaco, a honoré pour la première fois la Pologne de sa présence, et cela grâce à l'invitation de la Fondation Helsinki pour les Droits de l'Homme. Lors de cette première visite, à la question de savoir comment le gouvernement polonais pouvait soutenir le Tibet, Sa Sainteté le Dalaï-lama a répondu, sans hésiter, que cette aide pourrait passer avant tout par l'éducation des Tibétains de Pologne. Le gouvernement polonais a réagit immédiatement en attribuant, dès l'année suivante, les premières bourses d'études à des Tibétains. Ainsi, à la fin de l'année 1994, grâce au gouvernement polonais et aux nombreuses personnes de bonne volonté, ainsi qu'aux organisations agissant au profit du Tibet, les premiers Tibétains - un lecteur de la langue tibétaine et trois étudiants - se sont rendus dans la jeune démocratie polonaise avec pour but de poursuivre leurs études dans les établissements d'enseignement supérieur du pays. Ce fut le début de l'histoire de la communauté tibétaine sur le territoire de la République Polonaise. Depuis 1993, Sa Sainteté le Dalaï-lama a déjà visité la Pologne trois fois: en 2005, 2008 et, récemment, en juillet 2009 en tant que citoyen d'honneur de la ville de Varsovie. A chaque fois, Sa Sainteté le Dalaï-lama, lors des audiences privées avec les Tibétains, exprime son respect et sa reconnaissance envers la nation polonaise qui a su survivre à 123 années extrêmement difficiles sous les partages, et qui a fini par gagner l'indépendance en 1989, lorsque la III République Polonaise a été déclarée. Cette année fut, d'ailleurs aussi, heureuse et mémorable pour les Tibétains, parce qu'elle fut marquée par l'attribution du prix Nobel de la Paix à Sa Sainteté le Dalaï-lama, en dépit des contestations du pouvoir chinois.

Sa Sainteté considère que la nation polonaise, de par son passé douloureux, peut apprendre beaucoup aux Tibétains et les soutenir dans leur combat pour l'autonomie, contre le pouvoir chinois. En tant que représentant de cette communauté, j'exprime ma reconnaissance envers les Polonais pour leur soutient spontané et leurs gestes sincères de solidarité avec le Tibet, surtout dans cette période si difficile pour nous.

En tant qu'habitant de Varsovie naturalisé (j'habite en Pologne depuis 15 ans, dont 14 à Varsovie), je remercie cordialement la municipalité varsovienne d'avoir attribué en 2009 à Sa Sainteté le Dalaï-lama le titre de citoyen d'honneur.


Après 1994, d'autres Tibétains vinrent en Pologne, et cela aussi bien dans le but d'y poursuivre leur éducation que dans un cadre privé, en tant que membres de familles des citoyens polonais. Actuellement, la communauté tibétaine en Pologne compte dix-sept personnes (12 hommes et 5 femmes) mais c'est en 2005 et 2006 qu'elle fut la plus nombreuse lorsqu'elle compta 20 personnes. Malheureusement, une partie d'entre eux est retournée en Inde ou au Népal et une autre est partie à l'Ouest, après l'entrée de la Pologne dans l'Union Européenne en 2004, comme, d'ailleurs, beaucoup de Polonais.

Quant à moi et mes amis, nous travaillons pour des employeurs polonais. L'un est docteur ès sciences bouddhistes à la faculté des sciences orientales de l'Université de Varsovie et de l'Université Adam Mickiewicz à Poznań, l'autre est médecin et spécialiste en médecine familiale à la CSK (rue Banacha à Varsovie) et au centre médical privé de CARITAS du diocèse de Varsovie (quartier Praga), un autre encore est ingénieur en électronique au sein de l'entreprise LG, ou bien enseignant de la langue tibétaine à l'école privée à Varsovie (20, rue Raszyńska) et même barman au restaurant Dziki Ryż [le riz sauvage] à Varsovie. Certains font actuellement leurs études supérieures ou vont au lycée, d'autres travaillent à leur propre compte (clinique de phytothérapie tibétaine, magasin tibétain) tout en promouvant la culture et la tradition tibétaines. Quelques autres personnes n'ont malheureusement pas de métier fixe, ce qui résulte de leur mauvaise connaissance de la langue polonaise.

Je remercie la nation polonaise pour son aide, souvent généreuse financièrement - je pense, bien évidemment, aux bourses - accordée à moi-même et à d'autres Tibétains. Tout ce que j'ai réussi dans ma vie adulte, je le dois à l'Etat polonais. De plus, depuis un an, je suis l'heureux détenteur de la nationalité polonaise. J'en suis honoré et, en même temps, je me sens obligé de servir la Pologne et les Polonais tant que je peux. Je suis certain que six autres de mes concitoyens, qui sont maintenant également citoyen polonais, pensent de la même manière.

Pour ce qui est de la langue polonaise, elle est difficile - chacun le sait - mais, pour moi, extrêmement intéressante et je ne cesse de l'apprendre avec plaisir. J'ai terminé mes études de médecine en polonais et je travaille actuellement comme médecin familial en Pologne. Ce travail serait impossible sans une bonne connaissance du polonais. Cependant, beaucoup de mes amis rencontrent des difficultés linguistiques. La vérité est que l'on ne peut apprendre cette langue tout seul. La prononciation, elle, ne constitue pas un obstacle majeur pour un Tibétain qui retrouve en elle les mêmes sons que dans sa langue maternelle. C'est la méconnaissance de la grammaire polonaise qui empêche de dire quelque chose de censé.

En Pologne, depuis trois ans, fonctionne - malheureusement toujours de manière officieuse - une association mise sur pied par la communauté tibétaine et dont les buts principaux sont de:
1. Cultiver et faire connaître la tradition et la culture tibétaine ainsi que l'héritage tibétain.
2. Promouvoir la connaissance du Tibet et des Tibétains, en République et au-delà des ses frontières.
3. Agir au profit des Tibétains en Pologne et à l'étranger.
4. Agir au profit du Tibet et transmettre, pour qu'elles soient concrétisées, toutes suggestions et demandes de Sa Sainteté le Dalaï-lama et du gouvernement tibétain à l'étranger.
5. Organiser toute autre action au profit des communautés tibétaines.
6. Promouvoir l'idée de collaboration internationale pour le soutien du Tibet et des Tibétains dans leur combat pour l'autonomie.

Tous les Tibétains, à part une amie qui étudie à Cracovie, habitent à Varsovie. Nous nous rencontrons souvent en privé mais, à ce jour, nous n'avons pas de lieu fixe de réunions. C'est pour cela que les meilleurs endroits de rencontre sont actuellement Dom Tybetański Ascala[la maison tibétaine Ascala] à Stara Miłosna et le Sklep Tybetański [magasin tibétain] situé à 40, rue Hoża. Grâce au soutien et à l'amabilité de Mme la Directrice, qui nous cède le lieu à chaque fois que l'on en a besoin, il nous arrive de nous rencontrer lors des différentes fêtes qui se déroulent à l'école 20, rue Raszyńska, où sont inscrites trois étudiantes tibétaines. Cette école soutient fortement le Tibet et les Tibétains.

Texte: Dr Yeshi Lhosar
Traduction: Sadia Robein