Auteur: Diana Ifeoma Ude
Source: www.kontynent.waw.pl
Pendant chaque voyage il y a toujours un moment où le mal du pays devient particulièrement fort. Chaque plat « national », même un petit pain aux graines, nous semble être un délice recherché. Cette nostalgie particulière mais indicible et très bien connue de tous les voyageurs, arrive tôt ou tard, selon l’individu et la durée du voyage. Puisque j’aime bien manger et cuisiner (dans cet ordre), j’ai commencé à éprouver de la nostalgie de la cuisine faite maison à Istanbul déjà – c’est-à-dire deux heures après mon départ de Varsovie. Ma nostalgie augmentait lentement mais d’une façon conséquente, pour atteindre son apogée deux semaines avant le retour.
En lézardant deux semaines avant le retour en Pologne, j’ai rêvé des plats remplis de laitue fraiche, pizza faite maison, pirojki, pâté de soja, jus de carotte fraichement pressé... J’ai passé plus qu’une heure à rêver comme ça. Puisque c’était l’hiver au Nigéria, beaucoup de produits n’étaient pas accessibles aux bazars, ce qui a sérieusement limité mes possibilités de survivre. Pas grand chose à dire, l’hiver n’est pas une periode facile pour les végétariens et végétaliens au Nigéria. Au Nigéria on ne mange pas de produits laitiers. Le fromage et le yaourt sont des produits si rares que leur fraicheur suscite le doute même dans des meilleurs magasins dans la ville. On peut acheter du lait avant tout en forme du poudre; le lait liquide est plus rare et ressemble le lait sucré que l’on ajoute au café. Vendu dans de petites canettes, il satisfait parfaitement le besoin désespéré de consommation des produits laitiers. On utilise ce lait pour préparer des bouillies et des soupes pour des enfants. Un peu d’eau bouillante, de lait on poudre, de semoule – et voila, nous pouvons nourrir le gamin! Je dois avouer que c’était aussi très souvent la base de mes petits déjeneurs. Je chapardais du lait en poudre à mes frères et soeurs, le mélangeait avec des patetes et le mangeait sous forme d’une bouillie sucré. Les Nigériens adultes ne boivent pas de lait et ne mangent aucuns produits laitiers. Ce pourquoi je me cachais avec ma nourriture, d’autant plus que dans le quartier j’étais déjà considérée comme un phénomène interessant. Le manque des produits laitiers comme nous, les Européens, les connaissons est probablement lié à certains faits biologiques et industriels importants. Jamais je n’ai vu au Nigéria un élevage des bovins laitier – tous les produits laitiers sont importés. En plus, les Nigériens adultes ont du mal à digérer la lactose – le sucre de lait. Moi, j’ai découvert mon incapacité de digérer le lait comme étudiante. Obstinément j’ai decidé de ne pas renoncer à tous les produits, laissant le yaourt et les fromages dans mon menu. Et à chaque fois que j’en mange, le même scénario se répète...
Les Nigériens ne peuvent pas consommer de lait, mais ils adorent la viande. Ils en mangent autant que possible pour montrer leur richesse et prospérité. Le volaille et la viande de chèvre sont les types le plus populaires. Les chèvres et les poulets sont omniprésents au Nigéria. Ils se baladent sur des rues, des décharges, sur les voitures et des toits. La vue d’une petite chèvre rondelette se baladant sur des bazars et des parcs est vraiment édifiante. Moi, malheureusement, j’en ai vu une le plus souvent dans un pot ou dans un frigo. Des cornes, des sabots et la moitié du museau. L’odeur d’une chèvre cuite est si particulière qu’on ne peut pas l’oublier ni la confondre.
Imaginez-vous l’expression de mon visage quand, un matin, je suis entrée dans la cuisine et j’ai vu deux chèvres. L’une vivante, l’autre bien fumée et sechée dans un bol. Leur odeur était omniprésent. Quand je suis revenue dans la cuisine à midi – il faut quand même manger quelque chose – j’ai ouvert le frigo et vu les cornes et les sabots de la chèvre qui avait été bien vivante encore ce matin-là. Ma belle-mère avec quelques autres femmes se sont affairées dans la cuisine toute ja journée, alors l’option de « soupe au lait » était exclue. Pour rendre le travail plus agréable, elles ont demandé à mon père de leur apprendre une phrase en polonais : « Nie ma problemu » - « Il n’y a pas de problème», et l’ont répetée sans cesse. Il est intéressant qu’elles le répetaient en faisant un tel travail...
Mon père a raison de dire: « Si tu survis au Nigéria, tu survivras partout.»
Ifi Ude
Anna Bień
Source: www.kontynent.waw.pl